Si vous avez peur des maladies au point où cela a un impact négatif sur votre vie, vous souffrez peut-être d’hypocondrie.
Vous vous demandez alors probablement: Que faire si je suis hypocondriaque?
Cet article vous aidera à comprendre ce problème mais, surtout, il vous aidera à savoir quoi faire pour le traiter et mettre un terme à la souffrance.
Avant de débuter cet article, j’aimerais vous préciser que je n’invente évidemment pas ce que je vous y présente.
Je vulgarise et je synthétise ce qu’en disent les plus éminents spécialistes, notamment le docteur Jonathan Grayson.
Vous trouverez les références à la fin.
Cette précision faite, débutons…
L’hypocondrie est une attention soutenue (hyper-vigilance) aux moindres signes possibles de maladie sur son corps ou dans son esprit, suivie de réactions à cette manière de voir les choses, ce qui peut gravement nuire au quotidien.
Par exemple, on peut imaginer l’angoisse que vit une personne qui, lorsqu’elle développe une toux légère, se met à craindre d’avoir le cancer du poumon.
Selon le Dr Grayson, spécialiste du traitement du trouble obsessionnel-compulsif, l’hypocondrie est elle-même un TOC.
Ce TOC peut d'ailleurs même toucher les enfants et les adolescents.
C’est donc dans cette perspective que j’aborde le sujet à travers mes ressources en ligne sur les TOCS.
Définition et symptômes de l’hypocondrie
Selon le DSM (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux), la référence en psychologie et en psychiatrie, l'hypocondrie est la préoccupation constante avec la croyance (fausse) selon laquelle nous sommes en danger de développer une maladie grave.
Et selon Grayson, l’hypocondrie est un type de trouble obsessionnel-compulsif à travers lequel la personne qui en souffre passe une grande partie de son temps à s’inquiéter d’avoir une ou des maladies.
Par contre, je dois mentionner que la définition de l'hypocondrie en tant que TOC ne fait pas l'unanimité auprès des spécialistes.
En effet, l'approche «classique» cherche à distinguer le TOC de troubles proches mais distincts (diagnostic différentiel).
Mais une approche plus récente vise à rattacher ces autres troubles au TOC, car ils y sont fréquemment associés (1).
Pour ma part, pour des fins de simplicité, et suivant le Dr Grayson, j'opterai pour la seconde approche qui rattache l'hypocondrie au TOC.
Une des dimensions importantes pour identifier la personne hypocondriaque réside dans les actions qu’elle entreprend pour éviter que l’objet de ses craintes ne se réalise (un élément très présent dans les TOCS, que Grayson nomme «conséquences redoutées» (ou feared consequences en anglais).
Il existe plusieurs de ces conséquences redoutées impliquées dans l’hypocondrie:
- Quelle maladie ai-je? (ou «Ai-je une maladie?»)
- Que peut-il être fait pour guérir cette maladie? (ou «Cette maladie peut-elle être guérie?»)
- Que peut-il être fait pour soulager mes symptômes?
Comme la majorité des expressions du trouble obsessionnel-compulsif, l’hypocondrie implique deux dimensions:
1. Des craintes sous la forme de pensées obsessionnelles et intrusives (les obsessions).
2. Des comportements répétés (qui peuvent prendre la forme de rituels) qui visent à éviter que l’objet des craintes ne se produise (les compulsions).
Exemples d'obsessions qui se manifestent dans le TOC d'hypocondrie
- Craindre constamment d’avoir des maladies (infections, etc.)
- Les pensées inquiètes de type «Et si…» comme «Et si j’avais contracté telle maladie».
- Craindre de répandre une maladie et de contaminer les autres.
- Avoir peur de tomber malade en visitant un hôpital, le cabinet du médecin, etc.
- Craindre d’être contaminé par les pensées qui portent sur le fait d’être blessé(e) ou de tomber malade (soi-même ou ses proches);
- Et/ou être contaminé en voyant une personne malade, blessée, etc.
- Et/ou être contaminé par certains mots ou par le nom de certaines maladies;
- Etc.
Nous pouvons tous nous inquiéter à l’occasion de certaines maladies sans que cela ne soit obsessionnel.
Pour qu’une pensée devienne une obsession, elle doit revenir à l’esprit de manière répétée et lancinante.
Si vous aimeriez avoir plus de détails sur le sujet, je vous invite à lire mon article qui présente les obsessions les plus fréquentes du TOC et une définition détaillée.
Voici maintenant la seconde dimension dont je vous parlais: les compulsions, c’est-à-dire les comportements dont la répétition vise à éviter que ce que l’on craint se réalise.
Exemples de compulsions associées à l’hypocondrie
- Prendre sans cesse sa température et porter une grande attention à tout symptôme qui pourrait indiquer la présence de maladies;
- Voir régulièrement le médecin pour identifier d’éventuelles maladies;
- Faire des recherches sur Internet et lire des livres pour connaître en détail les maladies et leurs symptômes;
- Examiner son corps pour trouver des marques ou des bosses qui pourraient indiquer la présence de maladies;
- Faire des vérifications de toutes sortes comme se faire soi-même un test de la vue, tester ses propres sensations («Ai-je de la douleur?» «Est-ce que je vois aussi bien qu’hier?»), prendre son pouls, sa pression artérielle, etc.
- Demander de se faire examiner par ses proches pour identifier d’éventuelles maladies;
- Etc.
Puisque vérifier est une compulsion très fréquente dans l'hypocondrie, je vous invite à lire aussi mon article intitulé «La solution pour soigner le TOC de vérification et s’en sortir».
Il vous fournira des détails complémentaires importants sur la base de ce qui peut vous porter à vérifier pour calmer vos doutes.
Comme pour les obsessions, les compulsions impliquent la répétition et un impact négatif sur la qualité de vie (anxiété, angoisse, pertes de temps et autres souffrances).
Ainsi, le fait de voir le médecin une fois à l’occasion pour vérifier si l’on est malade n’est pas nécessairement une compulsion.
Je vous invite à lire cet article complet pour avoir une définition claire et une liste détaillée des compulsions dans le TOC.
Et voici un test d'hypocondrie qui vous aidera à savoir si elle vous touche.
Les causes de l’hypocondrie
Les causes de l’hypocondrie sont multiples et, comme pour les autres TOCS, une prédisposition biologique (génétique) est habituellement impliquée, ainsi qu’un haut niveau d’anxiété.
La peur des maladies se développe progressivement, à travers un «apprentissage»:
- De premières pensées intrusives associées à des craintes de maladies se manifestent.
- On tente de combattre ces pensées désagréables en les rejetant, en se rassurant, etc.
- Ces tentatives de rejet de ces pensées les font revenir de plus en plus et les rendent obsessionnelles (la souffrance augmente).
- On développe des comportements (compulsions) qui visent à se rassurer et à faire diminuer l’anxiété et la souffrance associées à ces pensées.
- Et ainsi de suite: c’est à travers ce genre de cercle vicieux que les TOCS se développent et empirent.
Vous aurez donc la surprise d’apprendre que les stratégies que vous avez peut-être mises en œuvre pour vous soulager de vos pensées obsessionnelles ont contribué à faire empirer les choses.
C’est la raison pour laquelle il faut appliquer d’autres types de stratégies pour sortir de ce cercle vicieux, car les méthodes que nous utilisons intuitivement (les compulsions) n’améliorent pas les choses: elles les aggravent.
Je ne m’attarderai pas davantage aux causes de l’hypocondrie dans cet article car vous trouverez sur mon site une foule d’autres ressources qui expliquent en détail le fonctionnement du trouble obsessionnel-compulsif ainsi que ses causes.
Quel type de traitement permet de soigner l’hypocondrie?
Quand on parle d’hypocondrie, on pense souvent à une personne qui fait se succéder les rendez-vous médicaux pour trouver des maladies dont elle n’est pas atteinte.
Cette vision des choses reste cependant très incomplète, voire fausse.
La peur obsessionnelle des maladies ne signifie en aucun cas que la personne qui en souffre n’est pas également atteinte d’une vraie maladie.
L’hypocondriaque peut avoir de vrais symptômes d’une ou de plusieurs maladies.
L’hypocondriaque peut avoir reçu ou non un diagnostic et être vraiment malade sans que cela n’ait de rapport direct avec sa peur des maladies.
Autrement dit, nous pouvons être vraiment malades ET être hypocondriaques.
Il est important de bien comprendre que les deux peuvent coexister car, selon Grayson, l’ignorer peut conduire à de mauvaises avenues de traitement.
Par exemple, la famille et le personnel médical peuvent vouloir surtout rassurer la personne qui en souffre, ce qui ne permet malheureusement pas de traiter l’hypocondrie elle-même.
Ainsi, si vous êtes hypocondriaque et que vous vous demandez quoi faire, vous devez d’abord savoir que l’objectif d’un traitement, toujours selon le Dr Grayson:
1. N’est pas de vous faire croire que vous n’êtes pas malade;
2. N’est pas de vous faire seulement arrêter de rechercher de l’aide et de la consultation auprès de différents spécialistes du domaine médical.
La raison vient du fait qu’à la base des troubles obsessionnels-compulsifs se retrouve une quête incessante pour obtenir la certitude absolue que ce qui est craint (feared consequences) ne se produira pas.
Dans la peur des maladies, cela signifie que l’hypocondriaque cherche constamment à être sûr(e) qu’il/elle n’est pas malade.
Le problème à traiter n’est donc pas la croyance d’être malade ou non, ni seulement les comportements compulsifs qui visent à rassurer…
Ce qu’il faut aborder est la recherche constante de certitude à l’effet que l’on n’est pas malade.
C’est ainsi que, pour vous libérer de l’hypocondrie, vous devez d’abord répondre à la question fondamentale:
Êtes-vous prêt(e) à tolérer une certaine dose d’incertitude relativement à votre état de santé? (donc courir le risque d’être malade)
Comprendre la crainte de l’incertitude qui se situe à la base de l’hypocondrie
Si vous avez peur des maladies, vous vous demandez sans doute constamment si vous souffrez d’un type d’affection en particulier.
Vous êtes donc très sensible aux moindres signes qui pourraient en indiquer la présence.
Et au moindre doute, vous consultez ou vous cherchez des informations pour vous rassurer.
Le problème avec cette manière de faire est qu’elle implique de croire que le moindre «symptôme» que vous pourriez identifier permettrait nécessairement à un médecin de savoir si vous souffrez d’une maladie, et d’identifier laquelle.
Il existe une foule de maladies pour lesquelles un diagnostic n’est pas toujours possible.
Pour certaines maladies, l’évolution de leurs symptômes prend du temps et ces symptômes peuvent finir par permettre à un médecin de faire un diagnostic.
Dans d’autres cas, les «symptômes» diminueront ou disparaîtront et ne seront le signe de rien de grave.
Comme l’explique Grayson, si vous avez vu plusieurs médecins (ou votre médecin plusieurs fois) et qu’il a été impossible de trouver de réels problèmes de santé, l’objectif du traitement de votre hypocondrie n’est pas de croire que vous n’avez rien mais d’accepter que la médecine ne peut rien vous diagnostiquer, ce qui laisse planer un doute quant à votre futur état de santé.
Ce doute est l’incertitude avec laquelle nous vivons tous et qu’il n’est jamais possible de dissiper de manière absolue.
C’est la base du traitement de l’hypocondrie: apprendre à tolérer les pensées obsessionnelles et intrusives associées à ces doutes et à cette incertitude.
Et le meilleur traitement qui existe à ce jour pour se libérer des obsessions liées aux TOCS se nomme l’exposition avec prévention de la réponse.
Il a été développé à travers la recherche et la pratique en psychothérapie cognitivo-comportementale et il a fait ses preuves.
L’exposition avec prévention de la réponse consiste à apprendre à tolérer les pensées obsessionnelles associées à vos peurs des maladies sans recourir à vos habituelles compulsions.
Le fait de vous exposer progressivement à ces craintes a pour effet de faire diminuer les réactions d’anxiété qu’elles suscitent.
Par définition, une pensée obsessionnelle a tendance à revenir encore et encore.
Et, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, c’est le fait de combattre ces pensées qui les fait revenir et qui augmente l’anxiété et le désir de réaliser les compulsions pour se soulager et se rassurer.
Mon livre sur les pensées intrusives et obsessionnelles et mon programme Web pour soigner le TOC vous présentent les meilleures stratégies pour vous aider à vous libérer des peurs qui reviennent sans cesse.
Ce sont des stratégies d’exposition «douces» qui aident à apprendre à tolérer les pensées associées aux craintes et à arrêter d’y réagir.
Le Dr Grayson propose de s’exposer aussi en recherchant directement à penser à ce qui nous fait peur.
Il propose des «scripts», c’est-à-dire des textes que vous pouvez écrire en relation à vos peurs des maladies et qui visent à les répéter de manière à vous y exposer.
Vous pouvez noter des phrases comme celles qui suivent et prendre du temps chaque jour pour les lire et bien en ressentir le sens et les émotions qui les accompagnent: c’est le cœur de l’exposition.
Exemples d’éléments du script que Grayson nomme «Je peux ne pas être diagnostiquable»:
- Peu importe l’intensité de mon désir de savoir si j’ai un problème de santé, il peut ne pas exister de réponse.
- Je dois limiter mes visites chez le médecin (et mes autres comportements de vérification pour me rassurer, comme les recherches sur Internet) car cela occupe beaucoup de temps et m’empêche de profiter de ma vie.
- Je sens que ce serait plus facile si je savais une fois pour toutes que je n’ai absolument aucune maladie, mais je dois tolérer l’incertitude et le fait que je ne pourrai jamais me rassurer à 100%.
Même si l’anxiété augmente temporairement à la suite de l’exposition, l’objectif du traitement est de la faire ensuite diminuer à mesure que vous vous habituez à tolérer les pensées associées aux peurs au lieu d’y réagir et de les combattre.
Même si vous désirez éviter de tomber malade, vous devez accepter la réalité que, pour un grand nombre de maladies, qu’elles soient diagnostiquées ou non, la prévention ne change rien.
En d’autres mots, craindre ces maladies et y penser constamment n’a d’autre effet que d’augmenter votre anxiété et de nuire à votre qualité de vie (votre travail, vos relations, etc.)
Soigner l’hypocondrie n’implique donc pas de croire que vous n’êtes pas malade ou que vous ne le serez jamais, mais de cesser d’essayer d’obtenir la certitude absolue (à travers les compulsions) que vous ne le serez pas.
Un des problèmes vient du fait que vous ne combattez pas des pensées farfelues: oui, des maladies existent bel et bien et, comme tout le monde, vous désirez éviter d’en souffrir.
C’est ici qu’entre en jeu l’importance de certaines croyances qui se situent à la base de votre désir de vous rassurer et qui rendent les pensées aussi obsessionnelles qu’effrayantes:
Le fait de croire fortement que le risque est élevé et qu’il faut absolument faire quelque chose.
En psychologie, ce genre de croyances très présentes dans les troubles anxieux, comme le TAG les autres TOCS, se nomment des «idées surévaluées» (overvalued ideation en anglais).
Une idée surévaluée implique un haut degré de conviction.
L’idée surévaluée qui sous-tend l’hypocondrie ne réfère pas nécessairement au fait que vous soyez ou non malade.
Elle porte davantage sur le fait que les risques de tomber malade seraient élevés, qu’il y aurait un réel problème et que vous devez rechercher des réponses et agir pour éviter ce que vous craignez.
Les gens (qui ne souffrent pas d’hypocondrie) ne considèrent pas élevés les risques de tomber (ou d’être) malade.
Autrement dit, ils ne sont pas touchés par cette idée surévaluée du risque de maladie et ne sont donc pas portés à développer des comportements pour se rassurer (les compulsions).
Une des manières de traiter le TOC implique un travail au niveau de ces pensées qui sont erronées.
Il s’agit de la partie dite «cognitive» du traitement.
Elle consiste à modifier ses croyances pour les rendre plus réalistes et non plus seulement concentrées sur un risque très faible.
Pour vous aider en ce sens, voici les éléments du script de Grayson sur le thème «Je ne pourrai jamais en faire assez»:
- Je sais que je cherche sans cesse à me rassurer sur mon état, mais je dois trouver une manière raisonnable d’aborder mes inquiétudes sur ma santé, c’est-à-dire accepter certaines idées que je n’aime pas.
- Je crois qu’il y a toujours un autre test, une autre vérification qui pourrait me prouver que je suis malade, et toutes ces vérifications font de ma vie un enfer.
- Je constate que malgré toutes mes recherches, mes démarches et les vérifications que je fais pour m’assurer que je ne suis pas malade, je ne me sens pas plus rassuré(e) intérieurement et mes inquiétudes continuent.
Vous l’avez sûrement constaté, l’anxiété et la détresse que vous vivez ne sont pas le résultat des symptômes des maladies que vous avez, mais celui de l’inquiétude qui découle de ce TOC.
Ce ne sont donc pas les maladies qui ruinent votre existence mais le fait de réagir aux inquiétudes de votre hypocondrie.
Si vous souffrez de ce TOC, vous entretenez probablement plusieurs rituels (compulsions) qui visent à soulager vos inquiétudes.
Vous prenez peut-être des rendez-vous avec des médecins et d’autres spécialistes de la santé, vous faites des lectures, des recherches sur Internet, des vérifications de votre corps, et malgré la souffrance et l’anxiété, vous considérez probablement toutes ces démarches comme étant normales et nécessaires.
Pourtant, à travers toutes vos visites médicales, vous savez à quoi vous attendre: vous vous doutez de ce que le médecin dira, puisqu’il vous l’a dit précédemment.
Vous vous doutez bien qu’il ne trouvera rien de plus et que l’objectif réel est de vous rassurer, ou vous espérez qu’il trouvera quelque chose de plus que la dernière fois.
Dans tous les cas, vous espérez obtenir des certitudes qui permettront enfin à vos doutes de disparaître.
Le docteur Grayson explique que cette tentative constante de se faire rassurer est un abus (de soi-même et des autres).
Un «abus» dans le sens où peu importe ce que les médecins et les autres spécialistes vous diront, vous ne serez pas satisfait(e).
Cette manière de vous rassurer vous procure un soulagement léger et de courte durée, et tout est toujours à recommencer.
C’est l’idée surévaluée que vous vous faites de votre état de santé qui vous porte à justifier toutes ces vérifications pour vous rassurer, et non une réelle surveillance médicale.
Il n’y a pas de raison de vous attendre à ce que votre état change de manière importante dans quelques heures ou dans quelques jours et qui nécessiterait de nouvelles vérifications.
La fréquence élevée des vérifications est simplement une manière de vous rassurer face à vos pensées obsessionnelles (inquiétudes sur votre santé).
Ce qu’un(e) hypocondriaque doit faire pour soigner son TOC demande donc d’accepter le fait que les médecins n’ont pas réponse à tout et ne peuvent trouver ce qui n’existe pas nécessairement.
Traiter l’hypocondrie implique d’accepter l’incertitude et de vivre avec les mêmes questions et les mêmes doutes que la majorité de la population au sujet de son état de santé.
Le rôle des compulsions dans le traitement de l’hypocondrie
Comme nous l’avons vu, l’hypocondrie est un trouble obsessionnel-compulsif qui implique des pensées obsessionnelles (les peurs des maladies), mais aussi des compulsions: les comportements qui visent à se rassurer de ces peurs.
Certaines de ces compulsions sont bénignes, comme prendre des suppléments alimentaires, ou mêmes positives, comme bien manger et faire de l’exercice.
Dans ce contexte, votre traitement ne demandera pas nécessairement de cesser ces habitudes, surtout si elles sont positives et qu’elles ne nuisent pas à votre quotidien.
Par exemple, si vous faites de l’exercice sur une base régulière et que vous pouvez sauter une journée sans que cela ne vous pose de problème, tout va bien.
Par contre, si non seulement vous ne pouvez manquer une seule journée d’exercice et que vous élaborez l’ensemble de votre vie autour de l’exercice, qu’il prend toute la place, cela peut être obsessionnel et nuire à votre qualité de vie.
Je ne parle pas ici des sportifs professionnels ou d’autres contextes qui justifieraient d’accorder autant d’importance à l’exercice, mais bien d’un comportement compulsif dont l’objectif est de se rassurer face à la peur de tomber malade.
Et s’il y a des compulsions «saines» jusqu’à un certain point dans le domaine de la prévention de la maladie, nombreuses sont celles qui sont malsaines.
Par exemple, le fait de tester un grand nombre de traitements «naturels» pour un problème qui n’a même pas été diagnostiqué peut faire courir des risques réels à votre santé.
Dans tous les cas, les compulsions à proscrire sont celles qui:
- Ne vous offrent aucun résultat positif;
- Accaparent une grande partie de votre temps et nuisent à la réalisation d’autres activités importantes au quotidien;
- Empirent votre état (ex.: augmentent votre anxiété);
- Vous font courir des risques;
- Tout autre comportement, démarche ou activité qui irait dans le même sens.
Notez aussi que, dans l’hypocondrie, les croyances qui font surévaluer les risques de tomber malade (les idées surévaluées que nous avons vues) vous portent à justifier la réalisation de toutes ces compulsions, même si elles vous rendent malheureux.
Le traitement de l’hypocondrie par prévention de la réponse
Puisqu’une grande partie de l’hypocondrie vient des pensées associées à la peur des maladies, une grande partie du traitement s’effectuera au niveau cognitif, soit au niveau des pensées elles-mêmes.
Comme nous l’avons vu, l’objectif est de tolérer et d’accepter progressivement les craintes associées aux maladies pour diminuer vos réactions (angoisse, anxiété, etc.) qui sont source de souffrances.
Vous pouvez utiliser les scripts que je vous ai proposés précédemment et les développer par rapport à votre situation.
Je vous conseille de les mettre par écrit pour pouvoir prendre différents moments de la journée pour les relire.
Mon livre qui constitue l'introduction de mon programme Web vidéo autodirigé de traitement du TOC vous présente aussi d’autres excellentes stratégies simples et efficaces pour procéder.
Et dans le cas de l’hypocondrie, comme dans celui d’autres TOCS, une part du traitement consistera à éviter de réaliser les comportements compulsifs.
C’est ce que l’on appelle en thérapie cognitivo-comportementale la prévention de la réponse.
La «réponse» est ici le comportement compulsif qui vise à vous soulager des obsessions et éviter que vos peurs ne se réalisent.
Car vos compulsions entretiennent votre anxiété et vos obsessions, et elles les empirent.
Beaucoup des compulsions associées à l’hypocondrie sont des compulsions de vérification.
Ainsi, par exemple, le fait de ne pas réaliser vos habituels comportements compulsifs de vérification pour vous rassurer fera partie du traitement.
Voici quelques exemples de règles de prévention de la réponse que le docteur Grayson propose en relation à l’hypocondrie:
- Si vous avez vraiment une maladie, ne pas consulter votre médecin au sujet de symptômes qui n’ont pas changé significativement, à moins que votre médecin vous ait dit le contraire.
- Si vous avez l’habitude de rechercher constamment une «seconde opinion» malgré le fait que les médecins disent généralement la même chose au sujet de ce que vous croyez avoir, cessez de rechercher cette seconde opinion à moins que des méthodes de test soient vraiment différentes et puissent apporter des informations nouvelles.
- La vérification de vos symptômes ne doit pas être réalisée plus souvent que ce que vous dit votre médecin (peu importe le type de vérification: la vision, des bosses sur la peau, les signes vitaux, etc.)
- Restez loin de l’Internet si vous ne pouvez pas résister à la tentation de faire des recherches sur des problèmes de santé que vous pourriez avoir.
Le traitement de l’hypocondrie ne suggère évidemment pas d’arrêter complètement de consulter le corps médical, surtout si vous êtes vraiment malade!
L’objectif est de faire la différence entre un risque réel (lorsque les gens qui ne souffrent pas d’hypocondrie consultent) et une simple incertitude à propos d’un risque (probablement faible), risque que vous pouvez apprendre à tolérer comme les personnes qui ne souffrent pas de ce TOC.
Soigner l’hypocondrie peut être un processus effrayant puisque vous avez l’impression que vous prenez de grands risques.
Ce sont les idées surévaluées associées à ce TOC qui vous donnent cette conviction source de tant d’anxiété et qui vous font croire que chaque vérification est importante et tout à fait raisonnable.
Et puisque la peur des maladies, en tant que TOC, implique d’abord de subir l’assaut répété de pensées intrusives qui portent sur ce que vous craignez, vous pouvez commencer à apprendre dès maintenant à vous libérer de ces pensées et vous en désensibiliser progressivement.
J’ai écrit mon livre qui constitue l'introduction de mon programme Web vidéo self-help de traitement du TOC exactement dans cet objectif et mes ressources ont déjà aidé un grand nombre de personnes.
Je reçois régulièrement des mots de remerciements de celles et ceux qui en profitent et cela me fait chaud au cœur!
Libérez-vous du TOC et des obsessions
Programme Web vidéo complet sur le traitement du TOC et accompagné de mon ebook sur les pensées intrusives en introduction.
De la crise de panique à la tranquillité
Ebook de stratégies d'intervention rapide pour une guérison durable.
Voici d'ailleurs un article à lire si vous vous demandez s'il est possible de guérir du TOC seul, par soi-même.
Ai-je un TOC? (ebook)
Ebook pour vous aider à savoir si vous souffrez bien de TOC.
Et voici mon module complémentaire pour aider avec la déprime/dépression, qui touche jusqu'à 40% des personnes qui souffrent de TOC:
Module complémentaire antidéprime
Module Web vidéo pour se libérer de la déprime en tant que conséquence fréquente du TOC.
Mais si vous pensez souffrir d’hypocondrie, n'hésitez pas non plus à consulter un(e) psychologue d’orientation cognitivo-comportementale.
Ce sont les meilleurs spécialistes avec le traitement par exposition avec prévention de la réponse qui est reconnu comme étant le plus efficace pour traiter le TOC.
Assurez-vous donc de choisir un(e) psychologue qui a de l’expérience avec le traitement des TOCS en général et de l’hypocondrie en particulier.
Si vous avez de la difficulté à en trouver dans votre région, vous pouvez considérer la consultation à distance.
Cet article vous explique comment procéder et vous présente une ressource efficace pour consulter un(e) psychologue en ligne.
Voilà!
J’espère que mon article détaillé vous aura permis de découvrir le fonctionnement de l’hypocondrie et vous aura orienté vers de bonnes pistes de solutions pour commencer dès maintenant à vous en libérer.
Si vous avez un témoignage à partager ou des questions, les commentaires ci-dessous sont là pour vous!
Et si le sujet du trouble obsessionnel-compulsif vous intéresse, voici d'autres articles détaillés que vous pouvez lire sur mon site:
- Sur la peur de devenir fou, de perdre le contrôle et de faire du mal aux autres, TOC aussi nommé «phobie d'impulsion»;
- Sur la recherche de preuves d'amour à travers le TOC du couple;
- Sur la jalousie obsessionnelle et maladive;
- Sur le "TOC homo" ou la peur d'être homosexuel (ou de ne pas avoir la bonne orientation sexuelle).
- Sur la dysmorphophobie, ou le fait de se concentrer sans cesse sur certaines imperfections de son corps.
- Sur le «TOC du lavage de mains» aussi appelé «TOC de la peur de la contamination».
- Et voici un article qui recueille des témoignages de guérison du TOC qui vous montrent qu'aller mieux est véritablement possible.
Note
1. Tifenn Raffray, «Comorbidités des troubles obsessionnels compulsifs», dans La Revue du Praticien, 2007, vol. 57, no 1, p. 37-41.
Références
- Abramowitz, Jonathan S. et al., «A Contemporary Conceptual Model of Hypochondriasis», dans Mayo Clinic Proceedings, 2002, vol. 77, no 12, p. 1323-1330.
- Abramowitz, Jonathan S. et Autumn E. Braddock, «Hypochondriasis: Conceptualization, Treatment, and Relationship to Obsessive-Compulsive Disorder», dans Psychiatric Clinics, 2006, vol. 29, no 2, p. 503-519.
- Boelen, Paul A. et R. Nicholas Carleton, «Intolerance of Uncertainty, Hypochondriacal Concerns, Obsessive-Compulsive Symptoms, and Worry», dans The Journal of Nervous and Mental Disease, 2012, vol. 200, no 3, p. 208-213.
- Fallon, Brian A. et al., «Hypochondriasis and its relationship to obsessive-compulsive disorder», dans Psychiatric Clinics of North America, 2000, vol. 23, no 3, p. 605-616.
- Grayson, Jonathan, Freedom from Obsessive Compulsive Disorder: A Personalized Recovery Program for Living with Uncertainty, 2014, Berkley Trade, 384 p.
- Visser, Sako et Theo K. Bouman, «The treatment of hypochondriasis: exposure plus response prevention vs cognitive therapy», dans Behaviour Research and Therapy, 2001, vol. 39, no 4, p. 423-442.
- Warwick, Hilary M. C. et al., «A Controlled Trial of Cognitive-Behavioural Treatment of Hypochondriasis», dans The British Journal of Psychiatry, 1996, vol.169, no 2, p. 189-195.
Chellal says
Bonjour,
D’abord merci pour cette page très encourageante.
J’habite en Algérie et je souffre d’hypocondrie depuis 3 ans. Je vais commencer à suivre à la lettre ce que votre page dit et voyons les avancements.
Nicolas Sarrasin says
Je suis heureux que mon article vous soit utile.
Je vous souhaite le meilleur.